Irlande
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L’arrivée à Dublin par le Ferry qui vient d’Angleterre présente un intérêt certain : le port de débarquement étant au cœur de la ville, il vous plonge directement dans une Irlande dynamique et souriante. Même si trente pour cent des 3,9 millions d’habitants de la République y habitent, Dublin est une capitale à taille humaine. L’animation qui règne dans la ville vous met tout de suite à l’aise. Le quartier touristique de Temple Bar, probablement celui où vous atterrirez en premier, ne réunit pas plus de vingt pour cent d’Irlandais pourtant c’est une bonne adresse pour y rencontrer des voyageurs sur le retour et connaître leurs impressions et bons plans.
La visite de la ville nécessite au moins deux jours pleins. Les monuments et centres d’intérêt sont assez proches pour tout faire à pied. Le Trinity collège, la plus vieille université irlandaise, mérite une attention particulière. La vieille bibliothèque accueille depuis la moitié du XVIIIe l’une des trois plus grandes bibliothèques des îles britanniques. Son stock est d’environ trois millions de volumes mais celui qui retiendra toute votre attention est le livre de Kells. Contenu dans la salle des trésors, ce manuscrit du IXe siècle est une copie des quatre évangiles. S’il est reconnu pour la qualité de ses enluminures, son histoire millénaire est aussi tourmentée que le christianisme en Irlande.
À Smithfield, le premier dimanche du mois, se tient le marché aux chevaux. Le seul ayant encore lieu dans une capitale européenne. Les enfants viennent chercher leur compagnon. Ici, le cheval remplace la mobylette ou le scooter pour ses enfants des quartiers pauvres.
De ces trois jours en ville, nous apprécions le couchage dans l’auto pour sa discrétion. À aucun moment, nous n’avons été importunés. Seul le stationnement payant nous interdit le centre-ville puisque les « pervenches “clampent instantanément tout véhicule étranger en infraction. Après trois jours de visite citadine intense, les grands espaces jouent de leur pouvoir d’attraction. Il est temps de prendre le large. Au sud, tout d’abord. Les cartes de l’excellent office du tourisme indiquent des routes panoramiques qui sont assez bien choisies.
Power Estate, Russborough House, Wicklow Mountains, Emo Court sont des endroits où vous passerez forcément tant ils méritent à être vu.
Nous passons la nuit à Glendalough. Cette ancienne cité monastique du VIe siècle a gardé des vestiges en parfait état. Sa tour ronde date du Xe siècle et servait à la fois de tour de guet, de clocher, de refuge et de grenier. Il en existe de nombreux exemplaires à travers le pays.
S’il nous est possible de dormir sur le parking, la région bien que sauvage ne permet pas de bivouac à proprement parlé. De même, il est assez difficile de passer une roue en dehors des petites routes sinueuses du réseau secondaire. Peu importe, la nature est omniprésente.
Un peu plus au nord, au centre du pays, Clonmacnoise offre le même spectacle que Glendalough en encore plus impressionnant. Le plus vaste et le plus riche ensemble monastique du pays, dominant les méandres du fleuve Shanonn, possède pas moins de huit églises, une cathédrale, deux tours rondes et trois grandes croix. Pouvant atteindre sept mètres de haut, ces croix illustrent des scènes de l’ancien et du Nouveau Testament et faisant par la lecture de ses fresques l’éducation religieuse des populations analphabètes.
Petit à petit, de sites touristiques en escales touristiques, nous franchissons la frontière de l’Irlande du Nord. À Belfast, certains quartiers portent encore les stigmates de 25 ans de guerre civile entre protestants et catholiques. Heureusement, aucune pression n’est plus perceptible même si le moindre poste de police ressemble toujours à un bunker. La ville, portuaire et industrielle ne présente pas d’énormes intérêts, le passage est bref.
En revanche, encore plus au nord, la côte déchiquetée débouche sur la Giant’s Causeway, la principale attraction touristique de l’Irlande du Nord. La chaussée des géants est une gigantesque succession de colonnes basaltiques étroitement imbriquées. L’impression réelle d’un dallage géant à induit des légendes qui ont perduré bien après le XIXe siècle, date à laquelle, la nature volcanique du phénomène a été prouvé.
En longeant, la côte du nord-ouest, la route est de plus en plus sauvage. La proximité de l’Irlande du Nord explique peut-être que les touristes ne s’y attardent pas. Pourtant cette région exalte des paysages sauvages et des habitants fort sympathiques. Un endroit où il fait bon d’aller à la quête des caractères forts de la culture celte. En descendant toujours plus au sud, le long de la côte, les falaises abrutes courent le long de glens, les grands plateaux où il fait bon aller lorsque le temps est clair. Le 4X4 permet ainsi des approches pour des ballades qui se terminent forcément à pied. La présence de tourbe est un vrai problème qui arrête nette toute progression. Un peu plus loin, notre auto en subira les frais. En cherchant à suivre un groupe de cavaliers sur une piste de remblais posée à même la tourbe, par endroit, la piste est trop étroite et c’est donc contraint et forcé que j’ai posé une roue en dehors de la lourde épaisseur de remblais. Dans la seconde, l’auto penchait inexorablement vers un vide qui ne cessait de s’accroître. La tourbe aspirant la voiture en disparaissant sous son poids.
Après plusieurs essais infructueux avec un autre 4X4 d’abord puis avec un tracteur deux roues motrices, nous sommes dans l’obligation de faire appel à un tracteur ‘de l’Europe ‘, appelé ainsi, car seules les subventions européennes permettent aux exploitants de ce payer une telle machine à quatre roues motrices.
Son propriétaire a accepté de faire le déplacement moyennant finance pour tenter un repêchage. Ce dernier mot n’est pas usurpé, car quatre autos gisent dans un amas de rouille autour de la mienne. Je sais que si lui n’y arrive pas, mon vieux BJ n’aura plus qu’à rester sur place et tenir compagnie aux autres épaves. Après une heure de lutte acharnée (deux sangles ont cassé et les deux jumelles du train arrière se sont retournées bandant les lames à leur maximum, les ponts faisant ancre) l’auto est sortie de son piège végétal. Le tracteur s’est embourbé à son tour. Il faudra compter sur la dextérité de ce chef de chantier pour récupérer son engin. Attention donc, la tourbe est bien le fech-chech du nord mais elle inspire une terreur bien plus terrible aussi. Dans ce cas, les plaques de désensablage ne servent à rien et disparaissent dans les profondeurs. Cette expérience suffit à expliquer pourquoi l’on retrouve autant de mammouths et autres animaux entiers dans les épaisseurs de ce matériau utilisé comme combustible pour le chauffage individuel.
Des tourbières, le Connemara en est plein. Pourtant, ici le relief escarpé rend difficile son exploitation industrielle à grande échelle. Ce n’est pas pour déplaire puisqu’ainsi les lands préservent leur beauté originelle. Dès que l’on sort des sentiers battus, la région est complètement déserte. Les moutons seront les seules âmes que vous rencontrerez.
Toujours perturbé par la mésaventure dans la tourbe, j’hésite à parcourir les rares endroits vraiment sauvages qui s’offrent à moi. Même en étant prudent, j’aurai besoin une seconde fois d’une aide extérieure pour sortir la voiture de la mouise. Dans ce cas précis peut-être qu’un blocage de différentiel aurait permis de m’en sortir seul… qui sait ?
Le Connemara est l’endroit où la concentration de Toy est la plus importante. La vie difficile que mènent ces fermiers n’est pas sans justifier le choix de leur véhicule.
Au sud de Galway, commence le Buren. Une région ou la végétation laisse la place à la roche nue. L’homme a quand même réussi à y installer des noisetiers pour rentabiliser ces lopins de terres inexistantes. Par contre, ce territoire recueille de nombreux dolmens. Leur recherche est un vrai jeu de piste puisque de hauts murs empêchent de les voir depuis la route. Il faut donc se repérer sur la carte avec précision pour les retrouver.
La suite de ce parcours de trois semaines nous fera emprunter les routes des péninsules de Dingle, Iveragh et Beara. Celle de Dingle à la meilleure réputation pour le panorama qu’offre la route qui la traverse de part en part mais les autres valent vraiment le détour. Sur celle de Beara, il est possible de bivouaquer au bord de l’eau à de nombreux endroits. L’itinéraire jusque Rosslare où Irish Ferries embarque les passagers désireux d’aller à Cherbourg, révèle encore de nombreux sites à découvrir.
Trois semaines n’auront pas été de trop pour effectuer le tour de cette petite île mais où il fait bon flâner et prendre son temps. Une destination coup de cœur autant pour sa nature que pour le naturel de ses habitants toujours prêts à entamer la discussion. Il est vrai que d’utiliser l’excellente formule des Bed and breakfast permet d’avoir un contact privilégié avec les locaux. Le tourisme est devenu une ressource à part entière pour l’Irlande mais les gens qui travaillent dans ce domaine gardent encore une vraie spontanéité. Connaissez-vous beaucoup de personnes autour de vous qui croient réellement aux fantômes ?