Mauritanie
Du sable et des cailloux…
Chinguetti, Ouadane, la passe d’Amojar, fort Saganne, le banc d’Arguin, des noms qui font rêver et que Sud expé propose de découvrir au travers du raid Saganne. Sur un format de trois semaines, ce nouveau parcours rassemble un panorama « exhaustif » de ce que l’on peut trouver en Mauritanie. Entre gueltas, oasis et grandes dunes, le terrain de jeu est sans limites.
Textes et photos : Marc Mellet
Participer à la première édition d’un raid a souvent des avantages. Pour cette nouvelle édition du Raid Saganne sans voyage en avion ni location de voitures, le nombre de participants restreints, huit équipages s’accompagne d’un encadrement omniprésent de trois autos d’organisation. De plus, le road book n’étant pas complètement figé car les reconnaissances se font à une période différente, de nombreuses options sont proposées aux participants sur leurs souhaits et desiderata. C’est ainsi l’occasion, en ouvrant certaines voies pour la première fois, une occasion de vivre des moments forts. Nous voilà prévenus.
Depuis quelque temps déjà, Sud expé recommande la traversée de la Méditerranée via « le Marrakech ». La traversée de Sète à Tanger à plusieurs avantages qui sont dans l’ordre une fatigue moindre et la possibilité pour le groupe de faire connaissance pendant les 36 heures de bateau. Le tout pour un coût qui n’est pas forcément de beaucoup supérieur, une fois tous les paramètres pris en compte, l’usure de la voiture comprise sur les 3500 kilomètres espagnols.
L’arrivée en terre marocaine se fait donc avec des mini-groupes déjà constitués pour parcourir l’autoroute qui mène à Essaouira. Il faudra encore deux journées de liaison pour rejoindre la Mauritanie, véritable point de départ de ce raid.
L’ancienne piste d’Atar longe la ligne de chemin de fer Nouadhibou — Zouerate. La principale richesse nationale provient du minerai de fer exporté à travers le monde. Cette ligne est célèbre car les trains qui la parcourent sont parmi les plus longs de la planète : jusqu’à 200 wagons chargés à ras bord de près de 100 tonnes d’un minerai d’excellente qualité tiré par trois locomotives de fortes puissances. La piste, très sablonneuse, traverse parfois quelques villages montés de toutes pièces pour la construction de la ligne du train depuis 1963 et qui perdurent malgré le manque d’eau et de végétation pour les troupeaux.
Quelques plantages ont lieu. Le sable mauritanien possède une meilleure portance au-dessous. C’est donc par une succession d’aller et retour sur les mêmes traces que nous parvenons à passer tous les points délicats. Globalement, le groupe est homogène. Seul un Vitara équipé de pneus route est à la peine. Il apprendra vite à ses dépens qu’il ne faut jamais sous-estimer ses pneumatiques. Malgré les nombreux avertissements des organisateurs, il arrive encore que des participants tentent de battre le record de crevaisons dans un raid. Dès les premiers jours, il lui faudra racheter des pneus. Ceux d’origine ayant déjà tous été détruits. Conclusion, même sur un raid de 8 000 kilomètres des pneus mixtes en bon état sont obligatoires.
L’arrivée à Chinguetti par l’oued qui coupe la ville en deux est complètement magique. Cette ancienne citée se bagarre contre l’ensablement inévitable que lui confère sa position au cœur de l’Adrar mauritanien. Enserrée dans son écrin de roche et de sable, la septième ville de l’islam dissimule dans ses bibliothèques un trésor vieux de plusieurs siècles. Des milliers de manuscrits hérités du temps des caravanes témoignent d’une intense activité intellectuelle aux confins du désert. Nous profitons de cette étape à l’auberge des caravanes en pleine ville pour visiter les bibliothèques privées. De nombreuses familles n’ont pas rallié le programme de sauvetage des livres proposé par l’UNESCO et continuent de présenter leur trésor au public. La manne touristique est trop importante.
Afin de quitter Chinguetti, nous empruntons l’ancienne piste qui serpente jusque-là passe d’Amojar. La transition entre sable et cailloux est des plus rapides. Le panorama est de toute beauté. La piste nous mène doucement au fort Saganne. Cet édifice maintenant à l’abandon a été construit de toutes pièces en 1984 pour les besoins du film du même nom. Il surplombe un panorama et des fractures qui rappellent haut et fort (sans jeu de mots) celles du grand Canyon aux États-Unis.
Depuis l’ouverture du tourisme en 1995, le pays voit surgir des initiatives intéressantes. C’est le cas de ce petit musée de la préhistoire monté par un ancien guide de Théodore Monod. Ce dernier lui avait expliqué « qu’un jour, les pierres taillées qui l’entourent seraient une richesse bien plus grande que tous les troupeaux de l’Adrar car les touristes viendraient de loin pour les voir ». Dix ans plus tard, ce minuscule musée qui remplit deux cases de trésors préhistoriques fait vivre une famille complète.
L’âme de Thédore Monod hante encore les lieux de cette partie du pays. L’émotion est à son comble lorsqu’au centre du Guelb el Richat, cette espèce de cratère érosif de 40 kilomètres de diamètres, nous allons à sa recherche spirituelle autour de l’arbre de madame Monod. Seul endroit arboré, où sa femme attendait le retour de ce chercheur au questionnement et à la curiosité intarissable.
Sûr qu’il aurait eu des choses à nous dire sur les crocodiles de la guelta de Matmata. En contournant par le haut de la guelta, nous arrivons à apercevoir deux spécimens. Survivants d’une époque où le Sahara devait ressembler à l’actuel Kenya, nous essayons de comprendre comment ils se reproduisent encore.
La formation du Monolithe de Ben Amira suscitera un nombre de questions aussi grandes. Quels sont les phénomènes qui ont entraîné la formation du plus gros rocher d’Afrique ? En l’absence de géologue, nous ne pouvons qu’admirer l’immensité du lieu, planté en plein désert de sable. En l’an 2000, un symposium de sculpture a accueilli une trentaine d’artistes internationaux qui y ont marqué a jamais de leur burin, les roches attenantes au monolithe d’Aicha, compagne mythologique à la féminité apparente de Ben Amira. Nous abandonnons la piste pour une portion de hors-piste dans les dunes, superbes. Pas facile d’ouvrir la voie dans un sable aussi mou. L’heure de la journée n’aide en rien. Le soleil gomme tous les reliefs. Dans ce climat peu sécurisant, l’équipage du seul Pajero verse sur le côté lors d’une marche arrière un peu précipitée. Ses occupants sortent sans dommage tandis que le treuil d’un camarade est déjà en action pour remettre la voiture sur ses roues. Il en suivra quelques heures de mécanique menées de main de mettre par Jean-Michel pour que l’auto reparte sans autre dommage que de la tôle froissée. Une fois de plus, le mécano aura transformé cette galère en aventure. Il y aura des choses à raconter au retour…
La piste de Zarga a l’Oued Rachid alterne dunes et roches selon un rythme discontinu qui entraîne gonflage et dégonflage. En route, l’épave d’un Pajero de course atteste que le Dakar à posé ses roues dans la région. Celui-ci à eux moins de chance que le notre. Nous passons un col dont la passe est indiquée au GPS. Grâce à cet outil indispensable, la navigation est grandement facilitée. Road book et GPS conjugués deviennent des indicateurs ultra-fiables. Le passage de dunes qui précède l’arrivée sur l’Oued Rachid passe en vingt minutes si nous l’abordons du bon côté. Je me souviens des difficultés que nous avions eues deux ans plus tôt. Trois heures avaient été nécessaires et le groupe s’était divisé en trois pour ne se retrouver que le lendemain matin. Ici, pas de problèmes majeurs et nous allons bon an mal an découvrir les gueltas de Taoujafet et de Tidjika.
Une option se pose quant à la suite du parcours : piste jusque Bou Naga ou traversée en hors-piste pour rejoindre cette ancienne base minière. Le groupe étant à l’aise et l’envie d’aventure étant plus forte que tout, la réponse est unanime : « va pour la transversale inconnue ». L’aventure continue.
Et quelle aventure ! Cette coupe est parsemée d’herbes à chameaux de part en part, si bien qu’il est impossible de passer en enroulant, le sable est très mou et surtout le turbo du Vitara vient de lâcher. L’arrière garde n’en peut plus de sortir cette auto incapable de monter la moindre côte. Un bivouac improvisé permet de tempérer tout le monde avant de reprendre la deuxième journée en pleine tempête de sable. Deux journées horribles que les participants ne sont pas près de regretter mais que la piscine et le bar de l’hôtel de Nouakchott feront oublier.
Le retour via le banc d’Arguin sera beaucoup plus tranquille. La magie de cette remontée semble éternelle et pourtant le bitume a sérieusement progressé. On peut facilement imaginer que lorsque cette route sera finie, les gestionnaires du parc n’autoriseront plus la traversée comme est elle est faite aujourd’hui. D’ailleurs, il est prévu que cette route descende jusque Dakar. Au rythme où vont les choses, il vaut mieux se dépêcher. Il n’a pas fallu plus d’une décennie au Maroc pour densifier son réseau routier. On peut imaginer que la Mauritanie et le Sénégal mettront un peu plus de temps mais il faut s’attendre à des changements rapides. À bon entendeur…
À prévoir :
Passeport : valable six mois après la date d’entrée dans le pays.
Visas : Une demande collective est accordée pour la Mauritanie. Formalités à l’entrée du pays. Coût environ 60 euros.
Santé : vaccin : fièvre jaune obligatoire, conseillé : DT Polio, Hépatite A et B, typhoïde. Traitement antipaludéen fortement conseillé. Assurance rapatriement obligatoire.
Assurance auto : il faut contracter une assurance spécifique à la frontière. L’organisation se charge des formalités.
Équipement : GPS obligatoire (une liste de deux cents points est fournie au départ), CB conseillée.
Le véhicule : une bonne révision de base ; autonomie de 800 km minimum ; pneu route à proscrire ; une roue de secours et un pneu ; 4 amortisseurs ; filtre à huile, air et gasoil ou essence ; pompe à eau ; disque d’embrayage ; gonfleur ; sangle de remorquage ; extincteur ; courroies ; contrôleur de pression ; plaques de désensablage ; crochets de remorquage avant et arrières ; pelle à sable. La liste complète est incluse dans le dossier technique du voyage fourni par l’organisation.
